Célébration du 20ème anniversaire AIDE Fédération

Le 09 et 10 Mai 2006 au Palais des Nations Unies à Genève

 Allocution d’ouverture :

M. Abdelkbir EL HAKKAOUI, Président d’AIDE Fédération

Remerciements :

    1. §        M. Javier Perez de Cuellar, ancien Secrétaire Général des Nations Unies
    2. §        Le Directeur de l’ONUG qui nous accueille aujourd’hui au Palais des Nations
    3. §        M. le Ministre Abderrahim El Harouchi, les Ambassadeurs, les Députés, les Elus
    4. §        Toutes les personnes qui se trouvent avec nous aujourd’hui, Directeurs d’Institutions onusiennes, responsables et membres d’ONG et d’associations ainsi que les chercheurs et universitaires

Notre ONG célèbre son vingtième anniversaire autour du thème :

« Comment surmonter les obstacles pour atteindre les Objectifs de la Déclaration du Millénaire pour l’année 2015 ? »

La présente journée devra dresser un bilan des programmes antérieurs, pour tirer les leçons des maigres résultats obtenus et les raisons des échecs enregistrés.

La réalisation des OMD ne pose pas que des problèmes politiques et économiques ; elle implique en particulier que soient identifiés et éliminés tous les OBSTACLES au niveau national et international qui perpétuent le sous-développement. Le bilan des cinq premières années des OMD laisse apparaître un accroissement de la pauvreté au niveau mondial, y compris, dans les pays riches. Aux Etats-Unis par exemple, en l’an 2000, 31.5 millions de personnes vivaient en dessous du seuil officiel de pauvreté, en 2004 ce nombre est passé à 37 millions, c’est à dire une augmentation de 5.5 millions sur une période de quatre ans. Aujourd’hui, 75 millions d’Américains ne bénéficient d’aucune assurance maladie.

Au niveau mondial, ce sont les deux tiers de la population qui vivent en dessous du seuil de pauvreté. Chaque jour des mouvements sociaux très violents, des gestes de désespoir dus aux aléas de l’Économie mondiale nous rappellent les dangers que peut engendrer cette injustice dans le système actuel. La famine, les conflits ethniques, le trafic de drogue, la traite des êtres humains ne sont pas des phénomènes isolés, mais la résultante de graves dérèglements sociaux induits par l’instabilité de la conjoncture mondiale actuelle.

À ces désordres s’ajoutent la mauvaise gestion, le manque d’infrastructure, le problème de l’accès à l’eau potable, l’analphabétisme et les maladies comme le SIDA ; le tout aggravé par des conflits, la dette, la corruption et les détournements de fonds. La misère que subissent les populations africaines, compte tenu des richesses naturelles du continent, est un paradoxe révoltant. L’Afrique subsaharienne est devenue la zone la plus endettée du monde, ses citoyens ont le droit de se demander à quoi a servi finalement l’argent de cette dette si chèrement contractée.

Entre autres, quelles sommes ont été investies dans les infrastructures routières, ferroviaires, aériennes et portuaires ? Et quels montants de cette dette ont été investis dans le système de santé, dans les domaines de l’éducation, de l’agriculture et de l’environnement ?

Une chose est certaine : le recours à la violence s’accroît avec l’augmentation des dépenses militaires des pays pauvres, forme d’assistance de certains pays développés plus soucieux de promouvoir l’exportation d’armes au détriment d’autres biens d’équipement. Certains chefs d’Etats n’hésitent pas à détourner la Constitution de leur pays pour se cramponner à vie au pouvoir ou le transformer en République héréditaire. Le tout dans l’indifférence complice des pays qui y trouvent leur intérêt.

Dans ce « Nouveau Désordre Mondial » il est clair que les intérêts économiques priment sur la démocratie, sur le respect des Droits de l’Homme et de la dignité des peuples.

Depuis l’adoption de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, chacun peut constater que les conditions matérielles et morales de quatre milliards de personnes ne font que s’aggraver. Ce qui constitue autant d’atteintes aux droits fondamentaux des êtres humains.

Au sommet même de l’Organisation mondiale, la démocratie et les Droits de l’Homme sont bafoués, la représentation des Nations qui la composent n’est toujours pas équitable. Rappelons que l’Organisation des Nations Unies a été créée dans des circonstances où primait la loi du vainqueur. Les grandes puissances se sont arrogées le privilège du droit de veto, pour sauvegarder leurs intérêts nationaux, au détriment des Chartes et des Conventions qu’elles ont elles-mêmes instaurées, mettant ainsi en danger la paix globale dont le Conseil de Sécurité est censé être le garant.

Il est regrettable que l’Assemblée Générale et le Secrétariat Général de l’ONU ne soient pas pourvus de prérogatives suffisantes pour contrebalancer les diktats du Conseil de Sécurité. En 2005, le réaménagement des institutions de l’ONU n’a même pas été amorcé, compte tenu du poids des situations acquises et des énormes intérêts en jeu… Dans ce contexte, malgré la bonne volonté de certains chefs d’Etat et de gouvernement, on voit mal comment les Nations Unies vont atteindre les Objectifs de la Déclaration du Millénaire qui prévoient de réduire de moitié, d’ici 2015, la proportion de la population vivant dans l’extrême pauvreté.

C’est hélas ! Sur ce constat négatif qu’AIDE Fédération est amenée à célébrer aujourd’hui, sa 20ème année de lutte en rendant le plus grand hommage et en témoignant de sa profonde admiration pour les personnes, associations et organisations qui militent sans répit pour la cause des Droits de l’Homme et de la démocratie dans le monde d’aujourd’hui.

Il appartient aux intervenants de mieux nous éclairer sur ces sujets complexes, en espérant que cette journée débouchera sur des propositions concrètes et réalistes, pour atteindre les Objectifs du Millénaire pour le Développement, notamment dans les secteurs prioritaires de l’eau, de l’éducation, et de la  santé.

            L’Humanité a beaucoup plus besoin de moyens pacifiques dans sa lutte contre la menace grandissante de la pauvreté mondiale que de s’entre-déchirer dans des luttes intestines au seul profit des marchands d’armes et des mercenaires néocoloniaux.

            Le devoir le plus pressant des Nations Unies et de toute la communauté internationale, est d’assurer une démarche solidaire dans ce sens, à l’échelle mondiale et d’oeuvrer pour un monde multiculturel dans lequel chaque peuple pourra gérer comme il l’entend son destin économique, politique et culturel.

            Nous estimons qu’il est grand temps de s’employer à faire plus largement admettre le principe du développement participatif en faveur des plus démunis, à améliorer la qualité de l’action communautaire, de façon à ce qu’elle contribue davantage non seulement à l’atténuation de la pauvreté dans l’immédiat, mais encore à la croissance économique à long terme.

            En effet, seule la démocratisation des institutions peut assurer une continuité à la construction économique.

            Les pouvoirs publics devraient également mettre sur pied des programmes qui favorisent la décentralisation en permettant notamment aux collectivités locales de concevoir elles-mêmes, à leur niveau, des solutions à leurs problèmes.

            Si la communauté internationale s’en donne les moyens, si et seulement si elle en a la ferme volonté politique, ces défis peuvent être relevés. On peut affirmer avec réalisme qu’il n’existe aucune fatalité du sous-développement ou de la fracture Nord/ Sud.

            La condition nécessaire et suffisante en la matière réside dans une réelle volonté des grands décideurs mondiaux de réexaminer la problématique des pays pauvres dans une dialectique qui mette en jeu les exigences d’un développement autocentré, face aux règles déshumanisantes de la mondialisation.

            Ce qui implique que chaque pays choisisse librement  les dirigeants qui sont en mesure de mettre en œuvre le mode de développement le mieux adapté à leurs propres fins et moyens. Dans cette perspective, la nouvelle donne géopolitique du XXIe siècle nécessite impérativement, la réforme du Conseil de Sécurité de l’ONU, afin d’harmoniser la cohérence des droits et des devoirs des pays membres, au seul service de la démocratie et de la paix.

            Et que conjointement, la Charte des Nations Unies et la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme s’imposent à tous, aussi bien dans leur lettre et leur esprit. C’est à cette seule et incontournable condition que les OMD, du moins dans leur présente formulation pourraient constituer un progrès décisif.